Jess donne naissance à Anna. Cet enfant est un bébé d’or pur, un bébé heureux qui sourit aux inconnus. Anna est née comme cela, à Londres, dans les années ’60. Certains parlent d’innocence, d’autres de déficience mentale, tous de différence.
L’existence d’une mère courage
Jess est une mère célibataire, anthropologue. C’est une mère courage, attentionnée, qui entoure sa fille de soins et d’un amour indéfectible.Une voisine et amie, Eleanor, raconte l’histoire de Jess et Anna. Les amours de Jess, ses intérêts, son attachement pour sa fille handicapée. Elle dresse le portrait d’un couple mère-fille dans un quartier de Londres, elle photographie une époque. Elle établit le constat sans accusation d’une société qui juge l’innocence et stigmatise la différence.
La santé mentale en Angleterre dans les années ’60
Nous suivons l’évolution d’un enfant jusqu’à l’âge adulte, un bébé d’or pur dont nous assistons à la naissance et qui devient l’enfant-femme-fille. Différence, innocence, déficience, “problème”, aliénation, état “Dumbo”… Ce livre prend aussi les allures d’une étude presque sociologique, d’un panorama de la politique menée en matière de santé mentale. Jess nous sert de guide dans le paysage des institutions psychiatriques en Angleterre dans les années ’60.De nombreuses références littéraires jalonnent ce livre, pour traiter du sort réservé aux enfants déficients : Pearl Buck, Arthur Miller, Jane Austen ont entretenu des relations diverses avec une fille, un fils ou un frère handicapé. La narratrice nous parle d’Anna, mais aussi de celle de Steve – ami suicidaire de Jess, ou de Zain – amant autrefois dépressif, ou encore de Raoul – neurologue qui s’intéresse à la douleur fantôme. Tous ces personnages suggèrent des considérations sur les problèmes mentaux en Angleterre dans les “golden sixties”. Ainsi de Steve:
“Le mantra de Steve, qu’il a répété un jour à Jess, est celui-ci : Le jour est un suppliceLa nuit n’apporte aucun répit.Elle a vraiment tenté de l’oublier, mais elle n’y arrive pas. C’est difficile pour Steve, il est né pour la souffrance innocente, qu’il semblait un moment avoir déjouée. Anna est née heureuse, un bébé d’or pur, mais Steve, lui, est né pour une souffrance blanche.” (p.272)
Livre étonnant donc, intéressant par son propos, mais déroutant parfois, parce qu’il emprunte toutes les propriétés du récit, en se détachant d’autant du romanesque.