Mando et Loup, enfants unis pour toujours , aux côtés d’Enza et de Nine, nounou et maman, rien n’aurait dû les séparer – si ce n’est quelque chose qui était là, mais que nul n’aurait pu imaginer.
Deux adolescents traversent ensemble les âges, liés par une amitié, indéfectible dans le chef de Mando, plus lâche dans le cas de Loup. Ils s’enflamment pour des jeux dans les allées du Parc Monceau, les querelles de bande, la littérature fantastique, les jeunes filles… Tous ces faits sont consignés par écrit dans un journal que tient scrupuleusement Mando, ami intransigeant.A cette volonté d’une amitié sans faille dont Mando est le gardien, Loup préfère au fil du temps se consacrer à Nine, sa seconde maman, ou Gaby, une vieille amie, un professeur de psychanalyse autour duquel se rassemble une jeunesse captivée. Des lâchetés bien quotidiennes.
Tout bascule, et le roman enfin intéresse, quand le personnage de Mando prend sa “vraie” dimension, tombe sous le coup de la folie. Le lien qui s’est défait entre les deux amis, l’attachement devenu manquant, rend toute une existence fragile, une vie bancale. Cette défection est l’incident qui fait perdre le lien d’un individu à la réalité et révèle le personnage en un psychotique. L’étincelle qui allume un tas de braise et le tranforme en un feu inextinguible. C’est la “mauvaise rencontre”.
Perdre un ami, devenir père, changer d’emploi, vivre un deuil : c’est l’occasion qui réveille un état latent.Un tabouret dont il manque un pied, raconte le professeur, tient encore debout.
“Mais il n’est plus question qu’il en manque un, sinon ça va très mal!”
Ces événements, ces explications métamorphosent également le roman, et donnent au récit, jusque là paisible, voire banal, une autre tournure, un tournant surprenant.Est-ce à dire que le livre tient dans cette surprise? Comme la révélation d’un secret, une énigme enfin résolue, une question qui reçoit in fine une réponse, pour le plaisir du lecteur.