Écriture singulière, sujet étrange, un petit livre dense. Pour son premier roman adulte, l’auteur nous enferme dans un univers bizarre, un huis-clos dont seule la fin du récit nous libère.
Séquestration
Un homme, prof d’histoire de 40 ans, fomente le projet d’enlever quelqu’un. L’homme, qui souffre de solitude après avoir perdu une grand-mère malade, veut séquestrer un individu au sous-sol de sa maison, aménagé à cet effet. Son choix se porte sur Joël, un adolescent en fuite après avoir vécu un drame familial dont il est l’auteur. Une relation se noue entre les deux êtres, noces clandestines consommées dans la souffrance.
Dans ce jeu de domination, dans ce lien pervers entre le jeune prisonnier et son geôlier, les positions s’inversent peu à peu. Le maître devient esclave, victime de sa passion pour son prisonnier, à moitié consentant.
“Le jour passa dans la découverte silencieuse de l’attrait qu’il excerçait sur moi. Il me tenait déjà sous sa coupe, bien plus que moi-même qui le détenais dans ma cave, et je me demandais jusqu’à quel point il en avait conscience.” (p.37)
Maître et esclave
Qui croyait prendre au piège, est pris dans ses propres rets. Maître est esclave s’adonnent à une union étrange, s’unissent dans des “noces clandestines”. Le rapport de domination évoluent en un drôle jeu de rôle.
Un peu à l’égal du lien qui relie le lecteur à l’auteur. Ainsi parle le narrateur des livres dont Joël est féru :
“En lire la première ligne vous asservit jusqu’à la dernière, et même longtemps après. Entre leurs pages, vous n’êtes plus maître de vous-même; vous vous abandonnez sans conditions à l’esprit d’une plume plus forte que vous, susceptible de vous emmener dans des travers sombres et glauques.” (p.90)
Mise en abyme étonnante. Mais par mégarde le narrateur oublie de verrouiller la porte de sa cave, et son prisonnier s’enfuit, laissant le gardien désemparé. Et nous aussi lecteurs, nous nous voyons de la sorte comme libérés dans les dernières pages du récit. Étrange.